Passion selon saint Jean, BWV 245 (1724)

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2, 4 ou 5 ?

Le Nouveau Testament nous invite à vivre quatre textes de la Passion, un par évangéliste (Marc, Matthieu, Luc et Jean).

Combien de Passions Bach a-t-il écrites ? À en croire son fils Carl Philipp Emanuel et son élève Agricola, les deux auteurs de sa nécrologie, Bach a composé « cinq Passions, dont une pour double chœur ».

Bach s’est penché sur chacun des quatre textes sacrés. Deux partitions nous sont parvenues intégralement : la Passion selon saint Jean, BWV 245 (1724) et la Passion selon saint Matthieu BWV 244 (1727) nécessitant un double chœur. C’est sans doute à cette dernière que la notice nécrologique fait allusion.

Le catalogue de l’œuvre de Bach recense aussi sous la référence BWV 246 la Passion selon saint Luc. Cependant les recherches musicologiques ont rapidement montré que l’attribution à Bach était plus que douteuse, et depuis lors, le catalogue l’a reléguée dans la catégorie « œuvres apocryphes ou anonymes ». Certes, il en existe une copie de la main de Bach datée de 1730 ; mais tout laisse à penser que c’est une copie pour l’usage immédiat.

La cote suivante dans le catalogue concerne la Passion selon saint Marc, BWV 247. Si le livret est conservé, la musique en est hélas perdue. Plusieurs reconstitutions ont été proposées en partant d’autres œuvres du compositeur, style parodique fréquent à cette période, aucune ne s’est révélée concluante.

La musique de la cinquième Passion dont parle la notice reste, à ce jour, égarée. On en connaît cependant le livret, composite, semblant emprunter à des travaux antérieurs du cantor.

Bach à Leipzig

« Puisque nous n’avons pas pu obtenir le meilleur, nous devons nous contenter d’un médiocre ». C’est ainsi que l’un des membres du Conseil de Leipzig a accueilli l’élection de Bach au poste de cantor de Saint-Thomas, le « meilleur » étant pour lui Telemann – auteur de 46 Passions dont aucune n’est restée dans la mémoire de l’Histoire – sinon Graupner, ces deux compositeurs ayant décliné l’offre. Sa fonction y est harassante : son poste musical à Saint-Thomas l’oblige à composer, recopier, diriger ses propres œuvres le dimanche, des Matines aux vêpres. Lui est confiée également la responsabilité d’organiser la musique dans les principales églises de la ville. En outre, il doit enseigner le catéchisme luthérien et le latin, et lui reviennent aussi parfois des séances de surveillance dans cette école de Saint-Thomas qui accueille, dans des conditions rudes, des jeunes déshérités.

Arrivé en 1723, Bach y restera 27 ans, jusqu’à sa mort. C’est pendant cette longue période qu’il compose l’essentiel de ses joyaux sacrés : un nombre considérable de cantates (il doit en préparer une chaque semaine pour l’office du dimanche suivant au moins pendant cinq ans, mais seules nous sont connues celles des trois premières années ; sur les 300 cantates sinon davantage qu’il aurait composées tout au long de sa vie et dont seules 200 nous sont parvenues, au moins 250 dateraient de cette période !) –-, le Magnificat, la Messe en si mineur, l’Oratorio de Noël et les Passions.

Du début à la fin

L’année suivant son installation à Leipzig, Bach est invité à produire une Passion pour être interprétée lors des vêpres du Vendredi Saint en l’église Saint-Nicolas (la proposition d’une Passion annuelle se faisait alternativement dans les deux églises Saint-Thomas et Saint-Nicolas). C’est donc en 1724 que fut terminée et donnée la Passion selon Saint-Jean.

Cependant, le compositeur la remettra sur le métier à plusieurs reprises, la dernière fois en 1749, l’année avant sa mort. Chaque nouvelle mouture a été établie pour que l’œuvre soit adaptée au lieu de l’exécution. Le manuscrit autographe initial ayant été perdu, les interprétations actuelles prennent en compte principalement la version suivante (1725), en se référant autant que faire se peut à la première version pour ce qui est de l’instrumentation, puisqu’on connait les instruments qui étaient à la disposition de Bach en 1724.

Au fil de l’œuvre

D’après le cahier des charges, Bach ne peut composer que de la musique non théâtrale. Pourtant, sa première Passion, traitée en oratorio, relate avec une puissance toute opératique l’action décrite par saint Jean. Bach n’a composé aucun opéra, mais ses deux Passions en sont des témoins à peine détournés.

Le livret n’est pas signé. Bien entendu, le texte de saint Jean, dans sa traduction allemande par Luther, est l’élément principal. Pour les paraphrases qui servent de support aux arias, Bach emprunte à des poètes de l’époque, principalement Brokes (auteur en 1712 d’une « Passion-oratorio » mise en musique par plusieurs contemporains, Telemann et Haendel en étant les plus célèbres).

La Passion selon Saint-Jean est clairement divisée en deux parties. Un tel découpage permettait l’insertion d’une homélie (pouvant durer une heure, paraît-il…) entre les deux. La première partie se termine au reniement de Pierre, la seconde à l’ensevelissement du Christ.

Pour ce qui est du texte biblique, les personnages sont Jésus, Pierre, Pilate, une servante, un garde qui interviennent essentiellement dans les récitatifs. Le chœur prend le rôle des groupes humains (foule, grands prêtres…). Quant à l’Évangéliste, très sollicité, fonction lui est attribuée de raconter et faire défiler l’action. S’y ajoutent les commentaires poétiques mis en musique dans les arias réservés à des solistes qui ne sont pas des personnages bibliques.

La partition est ponctuée de chorals que l’on peut considérer comme les cantiques de la tradition réformée, permettant à l’assemblée de participer à l’office en les chantant. Les mélodies de ces chorals sont puisées dans le répertoire traditionnel, connu par tous les fidèles.

Jean-Clément Jollet
Auteur

Concert « Jean-Sébastien Bach » du 27 novembre

Mot d’accueil du Président lors de notre concert « Jean-Sébastien Bach » du 27 novembre.

Bonsoir et bienvenue à chacun pour un concert tout à fait inédit, orgue et voix, donné au profit du Téléthon. Je précise que la somme de 5 € sera prélevée sur chaque billet vendu.

Jouer Bach ce soir, avec Cécilia Parody, est particulièrement émouvant. Vous allez, tout comme moi j’en suis sûr, apprécier sa belle voix si touchante.

La date du 27 novembre, fête de la Médaille Miraculeuse, n’est pas un hasard dans l’histoire de l’Orgue Notre-Dame de Fondettes.

En effet, c’est le 27 novembre 2016 qu’est né ce projet d’orgue pour l’église de Fondettes.

Deux ans plus tard, le 27 novembre 2018 la commande est passée au facteur d’orgues.

Son inauguration, le 20 mai 2022 après d’incroyables péripéties, tient quasiment du miracle.

Ce soir, vous entendrez tous à quel point ce magnifique instrument, par sa clarté et sa précision, est merveilleusement adapté à l’exercice d’accompagnement et notamment l’accompagnement de la voix.

Faire vivre et donner à entendre un orgue de cette qualité est un privilège et un cadeau qui m’inspirent une reconnaissance infinie envers tous ceux qui ont permis la réalisation de ce projet et tous ceux qui le soutiennent aujourd’hui.

Qu’il me soit donc permis de remercier Monseigneur Vincent Jordy et le Père Bruno pour leur accueil bienveillant à l’église Saint-Symphorien de Fondettes.

Monsieur Cédric de Oliveira, Maire de Fondettes représenté par Madame Nathalie Leclercq, Adjointe à la culture et à la découverte artistique, et le conseil municipal pour les aides à notre association.

Merci à Madame Nadège Arnault, Présidente du Conseil Départemental, représentée ce soir par Valérie Jabot, vice-Présidente du Conseil Départemental chargée de la protection de l’enfance, et Conseillère départementale du canton de Saint-Cyr-sur-Loire.

Merci à Valérie Périgord pour l’annonce dans la Nouvelle République.

Merci pour sa présence à Thierry Landrieu, Président de l’Aubrière.

Merci à tous nos précieux partenaires : le Crédit Mutuel, l’Abbaye de Vallières, Fundeta, Carrefour Express de Fondettes avec Johann Blondet son courageux patron, et tous les commerçants amis de l’orgue.

Merci beaucoup à Tony Robin pour l’écriture des programmes et pour les traductions des textes qu’il va présenter ce soir.

Un très grand merci également à Gérard Chambon pour ses prises de sons professionnelles. Grâce à lui, vous pourrez retrouver ce concert sur le site orgue fondettes.

À ces remerciements j’associe particulièrement la mémoire d’Annie Robert, Jean-Michel Gorry et Hugues Bataille, soutiens inconditionnels sur terre comme au ciel maintenant.

Après le concert, un verre sera offert sous La tribune par les membres de l’Association, pour un temps d’échange.

Vous trouverez le programme de l’année 2025 sur le site mais retenez dès à présent en janvier des visites patrimoniales originales : orgue et locomotives à vapeur, ici et à Saint-Pierre-des-Corps avec Michel Madinier, ici présent que je salue. En mars un concert spirituel, le 17 mai La Passion selon Saint Jean avec les solistes et chœurs d’Ile de France et le 21 septembre 2025 le concert du Patrimoine avec Vincent Grappy, l’organiste de Blois.

Il est toujours temps de nous soutenir par votre adhésion ou son renouvellement pour 2025 à remettre dès à présent à Philippe notre Trésorier. Nous recherchons activement un remplaçant pour lui.

Soyez tous vivement remerciés pour votre présence.

Je vous souhaite une excellente soirée… au pays de Bach ! et un très beau concert !

Jean-Marie Besse
Président et Conservateur

Nuit des églises – 29 juin 2024

Saint-Laurent de Rotterdam
Anonyme, 1669, Intérieur d’église St-Laurent de Rotterdam
(Lille, Musée des Beaux-Arts)

La pratique du métier d’organiste, héritière de conservatoires institués après l’extinction des maîtrises cathédrales, est tellement conjointe à l’art instrumental concertant de la fin du XVIIIe siècle puis au concert symphonique du XIXe, instaurant le récital du virtuose isolé, qu’il semble aujourd’hui très difficile de retrouver les conditions d’exercice de l’ancien statut de l’organiste polyphoniste, chantre, maître de chœur, compositeur, de ce que je considère comme cet « âge d’or » (1560-1685), qui précède même notre tant aimé Bach, évidemment héritier de ce monde tout en s’imposant comme novateur.

Jouer de l’orgue n’était guère souvent ouvrir une partition, mais plutôt réduire un motet ou une messe à quatre ou cinq voix d’un prédécesseur franco-flamand, improviser un ricercar ou une fantaisie sur les versets des hymnes ou du Magnificat, pour remplacer ce « chœur des anges » que représentait les chantres, la schola ou la maîtrise, puis, par transposition, l’orgue. La présence des anges sur les buffets d’orgue et des appellations de jeux comme la « voix humaine » (voce umana en Italie) s’explique dans ce contexte, que nous avons presque tous oublié.

TANDEM D’ORGANISTES ET CHANTEURS
Musiques liturgiques de 1500 à 1700

Le programme interprété par deux organistes et chanteurs à distance d’une génération (un trentenaire et un quinquagénaire), spécialisés en musiques anciennes (du médiéval au baroque), tente de remettre en perspective les réalités du métier d’organiste, en proposant un voyage du début de la Renaissance jusqu’à 1700 environ, ce à travers l’Europe, de Burgos à Strabourg, en passant par Lübeck et la cour de Vienne.

Œuvres de Johannes Kotter, Conrad Paumann, Antonio de Cabezón, Thomas Tomkins, Wolfgang Ebner, Heinrich Scheidemann, avec quelques incursions chez Dietrich Buxtehude et Johann Sebastian Bach, les grands maîtres du baroque allemand et international. Laissons-nous émerveiller par la diversité des styles, des écritures – certes savantes – d’un flux musical qui n’a vraiment rien d’austère !


Jean-François Goudesenne. Musicologue médiéviste au CNRS (Orléans), spécialisé dans le chant grégorien, ancien critique musical chez Diapason, son parcours musical est moins connu. Ancien élève de Bernard HÉDIN, après trois prix du Conservatoire de Lille (orgue, Jean BOYER ; clavecin, Noëlle SPIETH et musique de chambre baroque, 1989-1992), il suit quelques stages à Lisieux et Barbaste avec Élisabeth JOYÉ et Pierre HANTAÏ (1998). C’est au département de musique ancienne du Conservatoire de Tours qu’il se perfectionne en claviers anciens, auprès de Jean-Luc ÉTIENNE et Sébastien WONNER (depuis 2017). Son parcours le tourne vers les musiques liturgiques du médiéval au début du baroque, particulièrement vers l’alternatim et l’organologie des instruments antérieurs à 1650. Finaliste au Concours Manchicourt à Nielles-lès-Ardres (septembre 2022) et Cem spécialisation « claviers anciens » au Conservatoire de Tours (juin 2023).

Arthur Wilkens (1993) est un chanteur et organiste professionnel, spécialisé dans les musiques du Moyen-Âge et de la Renaissance. Dans ses travaux, il s’est concentré sur le chant grégorien, la musique mensuraliste et la musique d’orgue des XVe et XVIe siècles. Après avoir étudié la composition et la direction de chœur au Brésil, son pays d’origine, il choisit de poursuivre son cursus de musicien professionnel en France, où au Conservatoire Francis Poulenc à Tours il étudie le clavecin avec Sébastien WONNER et l’orgue avec Jean-Luc ÉTIENNE. Il a poursuivi sa formation en Suisse à la Schola Cantorum de Bâle, institution où il obtient une Licence et un Master en claviers anciens avec Corina MARTI. Au cours de ses études à la Schola, il a rédigé un mémoire de Master sur le jeu d’orgue au 15ème siècle, d’après un traité de Tomas de Santa Maria du XVIe siècle, sous la direction de Marc LEWON ainsi qu’un autre projet de recherche spécialisée sur la notion de mesure (mensura) en chant grégorien, sous la direction de Christelle CAZAUX. Il a été aussi élève de chant de Katarina LIVLJANIC.

Frédéric Fantasie est chanteur et instrumentiste, qui s’est spécialisé en musique ancienne, obtenant son Cem spécialisation « musique de la Renaissance » au Conservatoire de Tours (juin 2022), de même Ivan LEYMARIE, Professeur de yoga et grand étudiant au Conservatoire de Tours, au département de musique ancienne, dans la classe de Véronique BOURIN. Avec l’ensemble Ut Resonet melos, il s’illustre dans la musique médiévale, plus particulièrement le chant grégorien et les polyphonies des XIe-XIIIe siècles.