Anonyme, 1669, Intérieur d’église St-Laurent de Rotterdam
(Lille, Musée des Beaux-Arts)
La pratique du métier d’organiste, héritière de conservatoires institués après l’extinction des maîtrises cathédrales, est tellement conjointe à l’art instrumental concertant de la fin du XVIIIe siècle puis au concert symphonique du XIXe, instaurant le récital du virtuose isolé, qu’il semble aujourd’hui très difficile de retrouver les conditions d’exercice de l’ancien statut de l’organiste polyphoniste, chantre, maître de chœur, compositeur, de ce que je considère comme cet « âge d’or » (1560-1685), qui précède même notre tant aimé Bach, évidemment héritier de ce monde tout en s’imposant comme novateur.
Jouer de l’orgue n’était guère souvent ouvrir une partition, mais plutôt réduire un motet ou une messe à quatre ou cinq voix d’un prédécesseur franco-flamand, improviser un ricercar ou une fantaisie sur les versets des hymnes ou du Magnificat, pour remplacer ce « chœur des anges » que représentait les chantres, la schola ou la maîtrise, puis, par transposition, l’orgue. La présence des anges sur les buffets d’orgue et des appellations de jeux comme la « voix humaine » (voce umana en Italie) s’explique dans ce contexte, que nous avons presque tous oublié.
Musiques liturgiques de 1500 à 1700
Le programme interprété par deux organistes et chanteurs à distance d’une génération (un trentenaire et un quinquagénaire), spécialisés en musiques anciennes (du médiéval au baroque), tente de remettre en perspective les réalités du métier d’organiste, en proposant un voyage du début de la Renaissance jusqu’à 1700 environ, ce à travers l’Europe, de Burgos à Strabourg, en passant par Lübeck et la cour de Vienne.
Œuvres de Johannes Kotter, Conrad Paumann, Antonio de Cabezón, Thomas Tomkins, Wolfgang Ebner, Heinrich Scheidemann, avec quelques incursions chez Dietrich Buxtehude et Johann Sebastian Bach, les grands maîtres du baroque allemand et international. Laissons-nous émerveiller par la diversité des styles, des écritures – certes savantes – d’un flux musical qui n’a vraiment rien d’austère !
Jean-François Goudesenne. Musicologue médiéviste au CNRS (Orléans), spécialisé dans le chant grégorien, ancien critique musical chez Diapason, son parcours musical est moins connu. Ancien élève de Bernard HÉDIN, après trois prix du Conservatoire de Lille (orgue, Jean BOYER ; clavecin, Noëlle SPIETH et musique de chambre baroque, 1989-1992), il suit quelques stages à Lisieux et Barbaste avec Élisabeth JOYÉ et Pierre HANTAÏ (1998). C’est au département de musique ancienne du Conservatoire de Tours qu’il se perfectionne en claviers anciens, auprès de Jean-Luc ÉTIENNE et Sébastien WONNER (depuis 2017). Son parcours le tourne vers les musiques liturgiques du médiéval au début du baroque, particulièrement vers l’alternatim et l’organologie des instruments antérieurs à 1650. Finaliste au Concours Manchicourt à Nielles-lès-Ardres (septembre 2022) et Cem spécialisation « claviers anciens » au Conservatoire de Tours (juin 2023).
Arthur Wilkens (1993) est un chanteur et organiste professionnel, spécialisé dans les musiques du Moyen-Âge et de la Renaissance. Dans ses travaux, il s’est concentré sur le chant grégorien, la musique mensuraliste et la musique d’orgue des XVe et XVIe siècles. Après avoir étudié la composition et la direction de chœur au Brésil, son pays d’origine, il choisit de poursuivre son cursus de musicien professionnel en France, où au Conservatoire Francis Poulenc à Tours il étudie le clavecin avec Sébastien WONNER et l’orgue avec Jean-Luc ÉTIENNE. Il a poursuivi sa formation en Suisse à la Schola Cantorum de Bâle, institution où il obtient une Licence et un Master en claviers anciens avec Corina MARTI. Au cours de ses études à la Schola, il a rédigé un mémoire de Master sur le jeu d’orgue au 15ème siècle, d’après un traité de Tomas de Santa Maria du XVIe siècle, sous la direction de Marc LEWON ainsi qu’un autre projet de recherche spécialisée sur la notion de mesure (mensura) en chant grégorien, sous la direction de Christelle CAZAUX. Il a été aussi élève de chant de Katarina LIVLJANIC.
Frédéric Fantasie est chanteur et instrumentiste, qui s’est spécialisé en musique ancienne, obtenant son Cem spécialisation « musique de la Renaissance » au Conservatoire de Tours (juin 2022), de même Ivan LEYMARIE, Professeur de yoga et grand étudiant au Conservatoire de Tours, au département de musique ancienne, dans la classe de Véronique BOURIN. Avec l’ensemble Ut Resonet melos, il s’illustre dans la musique médiévale, plus particulièrement le chant grégorien et les polyphonies des XIe-XIIIe siècles.